Mademoiselle Trotte-menu du mardi
Lundi soir Mademoiselle Trotte-Menu a du bleu dans sa tasse à miroirs.
Le temps ne tourne pas rond mais ne se cogne pas aux angles non plus.
C'est un drôle de temps hésitant et souffreteux, mais pas vraiment. Un
temps qui voudrait se rendre intéressant.
Ce soir Mademoiselle Trotte-Menu regarde d'un œil interrogateur ce
drôle de temps qu'elle se trimballe au-dessus de la tête. Elle aimerait
qu'il se décide : les grosses gouttes ou le soleil chatouilleur. Elle
est fatiguée d'attendre une humeur qui se terre, une humeur timide qui
ne se sent pas le droit d'être là.
Mademoiselle Trotte-Menu voudrait bien l'apprivoiser, la rassurer :
"Tu sais Bleue, tu es belle aussi, et tu as le droit d'être là, tout
près de moi. Tu sais Bleue, tu peux de me prendre dans tes bras. Tu
sais Bleue, on aurait peut-être le droit d'être fragile à deux."
Oui, mais Bleue ne sort pas. Elle reste cachée dans son nuage.
Et Mademoiselle Trotte-Menu continue de traîner ce drôle de nuage bleu rosé accroché à un fil au bout de la queue.
***
Mardi soir Mademoiselle Trotte-Menu a l'humeur en carafe, comme une
araignée recroquevillée. Elle la regarde, elle l'étudie, elle lui
compte les pattes. Mademoiselle Trotte-Menu est dubitative. On dirait
qu'il en manque une.
Elle retourne le flacon, lui tapote le fond. L'humeur tombe -poum- sur
la table, et file claudiquante, confuse et honteuse, se réfugier
derrière la grosse fesse de la théière.
Ainsi donc Mademoiselle Trotte-Menu a l'humeur boitillante.
Il faudrait qu’elle l’attrape et qu’elle puisse la panser.
Mademoiselle Trotte-Menu reste pensive. Elle est perplexe. Son humeur n’a pas l’air décidé, et elle a peur de la brusquer.
Essai deuz', pour voir un peu plus loin, juste un tout petit peu